Jounal intime 926
Bernard Maris, Lundi 8 Mars 2010 20:50
Tiens ! La France se désindustrialise !
En 1986, Madelin a liquidé le secteur de la machine-outil en France. Depuis, les gouvernements de droite n’ont cessé de privilégier l’épargne contre l’investissement. Et tout à coup, Sarko se réveille !
Pinay, Giscard, Barre, Madelin, Sarko
Loin de moi l’idée de souscrire à la naïve dichotomie du « gentil entrepreneur » contre le « méchant spéculateur ». Plutôt que de « gentil entrepreneur », Marx parlait de « l’eunuque industriel » dont la simple activité consistait à maintenir dans la désir à jamais insatisfait pour des pacotilles ces pauvres salariés. Par ailleurs les « gentils entrepreneurs » ne sont pas véritablement opposés aux « méchants spéculateurs » : les exigences de rentabilité des seconds sur les premiers se traduisent par des exigences de productivité des premiers sur les salariés, ou, tout simplement, pas de juteuses délocalisations. Mais il est vrai que l’entrepreneur peut avoir une idée, un brevet, ou fournir une « valeur d’usage » quelque chose d’utile au peuple (un vélo électrique par exemple), alors que le banquier est un simple parasite (1).
Et si on veut favoriser les brevets, il faut aller du coté des industriels et non des financiers. Un financier n’a jamais rien découvert. Le CDS (Credit default swaps) contrats d’assurance sur des transactions futures, existe depuis la plus haute antiquité, c’est pas Jacques Marseille qui me démentira maintenant. J’avoue que je n’aimais pas tous ses livres, ni ses philippiques de converti contre les socialos – il n’est pire fanatique qu’un converti, voyez Saint-Paul ! – mais l’homme était joyeux et, comme Cavanna, circulait dans Paris à pied. Nous avions appris à plus que nous respecter. Il avait écrit un remarquable « Empire colonial et capitalisme français » (2) où il défendait la thèse partagée par Paul Bairoch (3) et ma pomme, selon laquelle la colonisation avait beaucoup plus coûté à la France qu’elle ne lui avait apportée. A preuve, les deux grandes nations industrielles, l’Allemagne et le Japon, n’ont pas pratiqué la colonisation.
La France n’est pas une nation d’industriels, mais de financiers et de banquiers. Toujours les épargnants, les petits commerçants, les paysans, les artisans ont été placés avant les industriels. Souvenons-nous de Pinay, l’homme au chapeau rond sur des idées carrées : c’est le type qui casse l’industrie française en 1952, au moment où elle est en train de bouffer l’industrie allemande, au nom du « franc fort » de « l’équilibre budgétaire » et de la « rigueur ». Souvenons-nous de Barre, et de sa doctrine des « créneaux » : il faut abandonner les secteurs où la France n’est pas très forte. De Giscard, l’ennemi juré du Plan, et de son grand emprunt à la Pinay indexé sur l’or, tout pour le rentier ! De Chirac l’ami des artisans et des paysans, qui clama, combien de fois « Ah, les gars, si chaque artisan embauchait une personne, une seule, il n’y aurait plus de chômage en France ! » Tu parles d’une politique industrielle ! Et souvenons-nous de Sarko, qui file de l’argent aux rentiers avec sa loi Tepa, et offre deux milliards d’euros par an aux restaurateurs ! Ca aussi c’est de la politique industrielle !
Et souvenons nous de Juppé et de sa merveilleuse phrase sur Thomson, « Thomson ça ne vaut rien, ça vaut 14 milliards de dettes ! » Ca aussi c’est de la « vista » industrielle ! quel talent ! Et de l’autre qui a ruiné sa boîte, en prônant le concept « d’entreprise sans usines ». Quant à Sarko, il a trouvé le bouc émissaire : les 35 heures ! Manque de chance, c’est pendant la période Jospin que l’emploi industriel a augmenté. Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose.
Soros, Paulson et les autres.
Que dire sur Goldman Sachs, qui conseille la Grèce d’un coté et l’étrangle de l’autre ? Goldman Sachs (dont l’ex patron fut Paulson, alors secrétaire d’Etat au Trésor de Bush), profita de la ruine de Lehman Brothers, fut abondé par l’Etat quand elle était en difficulté, et lorsque les Etats sont en difficulté, comme la Grèce, les enfonce. Faut pas réchauffer les serpents, faut leur couper la tête. Certes, Goldman Sachs n’est qu’indirectement à la manœuvre, directement on trouve les « hegde funds » qui s’appuient sur les masses énormes de liquidités que leur fournissent les banques (ces masses énormes elles-mêmes offertes par les Banques centrales et gagées sur les portefeuilles des contribuables). Pourquoi Soros fit-il fortune (un milliard de dollars) en torpillant la livre ? Parce qu’il était initié sur la dévaluation future de la devise. On ne peut pas faire fortune sans être initié. Soros est un philanthrope, un démocrate, un type de « gauche ». Quand on lui fait remarquer qu’il a participé, adolescent, à la spoliation des biens juifs en Hongrie sous l’occupation nazie, il répond : « Si je l’avais pas fait, d’autres l’auraient fait. » Pas beau, ça, madame ?
(1) Mais non, je sais ! il transforme de l’argent placé à court terme en investissements à long terme, sauf qu’il ne le fait plus. Et sa fonction de fabricant d’argent, de créateur de monnaie, ne devrait lui donner aucun droit de prélever des intérêts sur les consommateurs de crédit.
(2) Albin Michel, 2005, 1° éd 1984.
(3) Mythes et paradoxes de l’histoire économique, La Découverte, 1999.
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