martedì 9 marzo 2010

CRÉER DES MONNAIES RÉGIONALES POUR TRAITER LA CRISE GLOBALE

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CRÉER DES MONNAIES RÉGIONALES POUR TRAITER LA CRISE GLOBALE
par
Bernard LIETAER
Research Fellow à l’université de Californie à Berkeley - Ancien haut fonctionnaire de la Banque Nationale de Belgique - Architecte monétaire qui a contribué à la création de l’ECU - Auteur du livre : Monnaies régionales : des nouvelles voies vers une prospérité durable (Charles Léopold Mayer, 2008)

Séance du 13 mai 2009 organisée en collaboration avec l’IRE (Initiative internationale pour repenser l’économie) et Prospective 2100

Compte rendu rédigé par Yves Dougin

En bref

La crise bancaire et financière fait la une des médias depuis des mois.
Pourquoi est-elle plus grave que les précédentes ? Quelle en est
l’origine systémique ? Pourquoi les solutions conventionnelles
(baisser les taux d’intérêt, renflouer les banques, relance keynésienne)
ne suffiront-elles pas ? De plus, nous savons qu’elle coïncide avec
d’autres défis planétaires sans précédent comme le changement de
climat, les effets économiques du vieillissement des populations, et la
mutation technologique qui découple la croissance et l’emploi.
Quelles innovations monétaires sont disponibles dès aujourd’hui pour
résoudre structurellement ces défis, et changer cette crise en une
opportunité ? Que peuvent faire les États, les entreprises, et les
citoyens eux-mêmes, pour éviter d’être entraînés dans la débâcle
bancaire ? Voici les questions qui seront traitées pendant cette soirée.


EXPOSÉ de Bernard LIETAER

La crise que le monde traverse actuellement s’inscrit totalement dans l’actualité lorsqu’il s’agit d’évoquer les problèmes qu’elle pose. Mais elle disparaît aussi rapidement du paysage dès lors qu’on évoque les solutions qui permettraient de la résoudre durablement.
La dimension de cette crise prend toute sa mesure lorsque l’on examine la rapidité et l’ampleur de l’effondrement de la capitalisation boursière des plus grands groupes financiers internationaux auquel elle a donné lieu. La valeur boursière de Citygroup est ainsi passée de 255 milliards de dollars au second trimestre 2007, à 19 milliards en janvier 2009. Celle de la Deutsche Bank de 76 à 10,3 milliards… Nous n’avons jamais connu une telle simultanéité au niveau mondial. De multiples raisons ont été invoquées pour expliquer ce séisme. On parle d’absence de régulation, d’erreur individuelle ou collective, mais jamais du système monétaire lui-même. Ma thèse, c’est que ce système est devenu structurellement fragile parce qu’il est systémiquement instable. Je vous propose une métaphore pour illustrer mon propos : imaginez une voiture qui n’a pas de frein, dont le volant ne fonctionne pas bien, et avec laquelle je vous propose de traverser les Alpes…. J’ignore quand, et à quel moment surviendra l’accident, mais je sais de façon certaine qu’il aura lieu. Et lorsque celui-ci se produit, tout le monde accuse le conducteur. Mais personne ne parle de la voiture, qui, vous l’avez compris, symbolise dans cette histoire notre système monétaire : celui-ci montre de graves signes de dysfonctionnement, mais nous sommes pourtant prêts à nous ruiner pour essayer de le reconstruire à l’identique.

176 crises monétaires en 25 ans

Il y a eu 96 crises bancaires et 176 crises monétaires au cours des 25 dernières années. Elles n’étaient pas toutes dues au problème des subprimes. L’accident se répète périodiquement mais nous continuons de traiter chaque nouvelle crise comme s’il s’agissait de la première. Et à chaque fois, l’addition pour la remise en état de la voiture est plus salée. Pour la seule crise des subprimes, Bloomberg évalue l’impact financier du sauvetage des banques américaines à 7,7 trillions de dollars, soit 50 % du PNB américain ! (NB un trillion = mille milliards). Pour remettre tout cela en perspective, on peut rappeler que le plus gros coût de toute l’histoire des États-Unis a été le financement de leur participation à la Seconde Guerre mondiale, soit 288 milliards de dollars de l’époque. Réajusté du niveau d’inflation, cela donnerait aujourd’hui 3,6 trillions. Quand on ajoute à cette somme, toujours en tenant compte de l’inflation, le coût de l’achat de la Louisiane, le New Deal, le Plan Marshall, le budget la Nasa pour l’expédition de l’homme dans la lune, la crise des Savings and Loan entre 1986 et 1996, la guerre de Corée et celle du Vietnam, on obtient un total de 6,95 trillions de dollars. On est encore en dessous de ce qui a été dépensé en quelques mois pour tenter de colmater les effets de la crise actuelle. On est bien sur un terrain sans précédent…

L’absence de diversité nuit à l’efficacité

Les options prises pour gérer ces crises – qu’il s’agisse de racheter et d’isoler les actifs toxiques ou de nationaliser partiellement les banques – constituent des solutions ponctuelles qui ne permettent pas d’en résoudre les causes : on continue de rouler dans la même voiture…
Pour essayer d’avancer dans nos réflexions et de voir dans quelle mesure des solutions systémiques sont imaginables, je vous propose de changer de poste d’observation et de nous rapprocher des théoriciens de la complexité. Le professeur d’écologie théorique américain Robert Ulanowicz est de ceux-là. Il travaille depuis 25 ans sur des modèles permettant de quantifier les réseaux écologiques naturels. Le résultat de ses recherches, publiées il y a moins de deux ans, montre que la durabilité d’un réseau complexe est mesurable et que son équilibre optimal se situe entre l’efficience et la résilience, comme montré dans le graphique suivant. Un système en réseau complexe n’est viable qu’a condition qu’il y ait ni trop peu, ni trop de diversité et d’interconnectivité.



Un système avec trop peu de diversité sera peut-être très efficace, mais il devient aussi de plus en plus fragile.. En revanche, si l’on va trop loin dans la diversité, le système stagne par manque d’efficacité et de directivité.


Les monnaies complémentaires, une réponse aux crises

Nous pouvons appliquer cette théorie au système monétaire, puisqu’une économie mondiale est en fait un réseau dans lequel circulent les monnaies officielles. Le niveau de diversité qui y prévaut est faible. Toutes les monnaies conventionnelles sont exactement du même type : elles sont toutes créées comme des dettes bancaires. De plus, on a toujours justifié le monopole d’une monnaie unique dans un pays au nom de l’efficacité. Et c’est vrai : une monnaie nationale unique favorise les échanges entre les citoyens de ce pays, et rend la formation des prix plus efficace dans l’espace national. En 1955, l’économiste Milton Friedman a démontré que le système monétaire mondial serait plus efficace sans aucune barrière règlementaire,. Et il avait raison puisque après la dérégulation le volume des échanges financiers internationaux a explosé. Ce que je ni Friedman, ni aucun autre économiste pouvait comprendre est que nous avons ainsi rendu le système mondial terriblement fragile, comme on peut voir sur le graphique lorsqu’on pousse trop loin vers l’efficacité.
La solution se trouve donc dans la diversité monétaire par l’introduction de monnaies autres que les monnaies conventionnelles : des monnaies locales, régionales, ou fonctionelles. . Lorsqu’elles apparaissent, ces monnaies augmentant la diversité et les interconnections du système économique. Elles diminuent son efficacité, mais améliorent sa capacité de résilience. Elles permettent par ailleurs de résoudre des problèmes très divers auxquels nous devons faire face aujourd’hui, depuis la gestion des conséquences économiques du vieillissement de la population, ou les problèmes de développement durable.


Remettre en cause nos certitudes

Pour mieux comprendre comment l’apport de monnaies complémentaires peut permettre de résoudre les causes systémiques des crises monétaires et financières, il faut d’abord revenir sur deux postulats de base sur lesquels s’appuie l’enseignement de l’économie. Mais qui sont malheureusement faux. Le premier stipule que l’argent est un instrument d’échange neutre n’affectant ni le type des transactions, ni l’horizon ou les types d‘investissements, ni les relations entre les utilisateurs. La seconde hypothèse stipule que les « choses sont comme elles sont » et que, par conséquent, le système financier tel que nous le connaissons est un fait établi et immuable : aucun des cours d’économie que j’ai pu consulter n’évoque l’hypothèse d’un système monétaire différent de celui que nous possédons. Pour le commun des économistes, le système monétaire n’est donc pas une variable de décision. Il est une donnée de base supposément immuable. Il existe pourtant de nombreuses preuves empiriques et académiques qui montrent que l’effet du type d’argent utilisé n’est pas neutre ni sur la transaction, ni sur la relation entre les utilisateurs. J’ajouterais enfin que lorsque l’on introduit des monnaies complémentaires, on constate que les gens agissent de façon différente avec elles.
En voici un exemple : lorsque vous utilisez les Miles qui vous sont offerts par votre compagnie aérienne, vous utilisez une monnaie complémentaire qui a pour objectif de vous orienter dans votre façon de consommer le transport aérien. Elle renforce votre fidélité au groupe de lignes d’aviation qui les émet. Cette monnaie complémentaire fonctionne en parallèle avec la monnaie classique, elle n’est pas créée par les banques, comme le sont toutes les monnaies classiques, et elle n’est pas affublée d’un taux d’intérêt. Elle n’est utilisable pour spéculer. Et pourtant, 14 trillions de Miles existent à travers le monde et 1,5 trillion d’unités sont créées chaque année. On voit bien qu’il ne s’agit pas d’une affaire marginale. Malgré cela, personne n’en parle…

Du Mile au WIR

Laissez-moi vous raconter une autre histoire. Celle de 16 hommes d’affaires suisses qui se retrouvaient périodiquement dans un café à Zurich dans une période de crise semblable à la nôtre. Ils se plaignaient beaucoup : leur banque – ou celle de leurs clients – venait de leur annoncer qu’elle allait réduire leurs lignes de crédit. Faute de ce soutien, certains d’entre eux se voyaient dans l’impossibilité de payer à leurs fournisseurs ce qu’ils avaient prévu d’acquérir. Ils ont alors décidé de s’entendre de façon à pouvoir continuer à faire des transactions directement entre eux, plutôt qu’avec l’argent de leurs banques. Les uns – ceux qui achètent – comptabilisent des débits envers les autres – ceux qui vendent. À l’inverse, ces derniers bénéficient de crédits envers les premiers. Ces débits et ces crédits sont exprimés dans une monnaie commune qui s’appelle le WIR. Ce système monétaire, qui existe depuis 1934, est aujourd’hui utilisé par un quart des entreprises suisses. Les échanges interentreprises libellés en WIR représentent près de 2 milliards d’euros par an. La Banque coopérative WIR, dont le siège est à Bâle, compte 75 000 PME clientes. Là encore, personne n’en parle. Ce qui est fascinant dans cette histoire, c’est que le professeur d’économie américain James Stodder, qui a réalisé une étude sur l’impact du WIR, a démontré que la stabilité de l’économie suisse, sa grande capacité de résilience par rapport aux économies voisines, s’explique par l’existence de cette monnaie parallèle. Celle-ci fonctionne spontanément à contretemps par rapport au franc suisse. À chaque fois qu’il y a une récession dans l’économie du pays, le volume des échanges en WIR augmente. Inversement, lorsqu’elle retrouve le chemin de la croissance, le volume des WIR en circulation diminue. Tout simplement parce que tout homme d’affaires normalement constitué préférera – si je lui donne le choix – être payé en francs suisses – qui lui permettront d’acheter partout dans le monde – plutôt qu’en WIR, qu’il ne peut échanger qu’avec les 75.000 autres membres dans les limites de son propre pays. Si, en revanche, le crédit en monnaie nationale se resserre, le même homme d’affaires préférera passer une transaction en WIR plutôt que de ne pas vendre du tout.

Convaincre les banques

Le problème, c’est que les banques n’aiment pas les monnaies complémentaires. Et on les comprend. Personne n’abandonne de gaîté de coeur une situation de monopole, qu’elles exercent à la fois sur la création de monnaie et sur le contrôle des échanges… C’est un peu comme expliquer les bénéfices du logiciel libre à Bill Gates. Ces nouveaux logiciels se sont pourtant développés sans lui, preuve que la bataille est jouable. D’autant plus que ces systèmes monétaires parallèles existent et que les monnaies complémentaires se développent partout dans le monde. Lorsque j’ai commencé à m’intéresser à ce phénomène, au début des années 1990, il y avait environ 300 monnaies complémentaires dans le monde, dont le WIR. Il y en a aujourd’hui plus de 5 000 ! Pour l’immense majorité d’entre elles, il ne s’agit pas de systèmes commerciaux mais de modèles à vocation sociale, d’une trop petite échelle pour résoudre notre problème d’instabilité financière chronique et planétaire. Mais je compare tout cela à l’aéronautique des frères Wright : on avait montré au début du XXe siècle que voler devenait possible. On sait désormais que les monnaies complémentaires, c’est possible. Il faut maintenant les organiser correctement et à une échelle où elles peuvent faire une différence. De ce point de vue, je peux vous citer de très nombreuses expériences extrêmement intéressantes et prometteuses. Le Time Dollar, par exemple, s’appuie sur des échanges de services basés sur une comptabilité de débits et de crédits exprimés en heures entre individus. L’heure totalisant 60 minutes dans la plupart des pays du monde, les risques d’inflation sont nuls… Il existe aujourd’hui environ 400 réseaux Time dollars dans le monde.

Des monnaies pour lutter contre l’isolement

Au Japon, une expérience de monnaie complémentaire permet de réduire le problème financier posé par le vieillissement de la population, l’un des défis majeurs de l’humanité pour la prochaine décénie. Près de 20 % de la population japonaise a plus de 65 ans et 1,8 million de personnes ont besoin d’une aide journalière. Il s’agit d’un problème impossible à gérer durablement dans le cadre d’un monopole monétaire conventionnel… Dans le système japonais Fureai Kippu, mis en place par monsieur Tsutomo Hotta, la monnaie complémentaire permet de financer toute aide qui n’est pas couvert par l’assurance maladie : l’aide à domicile, l’accompagnement, le soutien moral, les achats, préparation de nourriture, etc. Lorsque je rends un service à une personne âgée dans mon quartier, je suis crédité du temps dépensé sur un compte épargne électronique. Je peux les utiliser pour rémunérer quelqu’un qui viendra m’aider le jour où je serai malade. Ou bien les transférer à ma mère, pour qu’elle rémunère un membre du réseau installé dans sa région en échange de son aide. Il y a 487 systèmes de ce type au Japon, qui viennent en aide à des centaines de milliers de personnes. On peut également citer le réseau de Yamato Love – pour LOcal Value Exchange – initié par la mairie de la ville de Yamato qui compte 700 000 habitants. Un tiers des habitants utilisent ce système de monnaie complémentaire, chacun créant son propre sous-système à partir d’une carte à puce qui permet de comptabiliser et d’effectuer les échanges. On peut parler aussi d’Ithaca Hours1 une monnaie locale créée en 1997 à Ithaca, dans l’État de New-York, ou encore du réseau allemand Regio (RegioNetzwerk) dont 28 systèmes locaux sont déjà opérationnels, et 35 autres en formation. Le plus connu est le Chiemgauer 2 qui fonctionne dans le sud de la Bavière . En France, enfin, le système SOL s’appuie sur une carte à puce du type de celle qui existe à Yamato. Ce système porte trois types de monnaies : une monnaie interentreprises – le SOL Coopération – dont l’unité est équivalente à l’Euro ; une monnaie sociale – le SOL Engagement – dont l’unité est le temps, comme pour le Time Dollar ; et enfin une monnaie sociale affectée en Euros sur le modèle des « chèques-repas »..

Passer à la vitesse supérieure

Des projets plus ambitieux sont en train de voir le jour. Sept villes européennes – dont Dublin, Bristol, Bremen et Bruxelles – devraient lancer l’hiver prochain un projet Interreg dont le but est la création d’une monnaie favorisant la réduction carbone. Le principe est très simple : lorsque vous achetez une ampoule basse consommation par exemple, vous recevez un certain nombre de points. Ces points sont utilisables pour acquérir d’autres biens « verts » qui participent à la réduction des gaz à effets de serre. Vous pouvez par exemple les utiliser pour payer votre facture d’électricité « verte ». Cette monnaie affectée donne une direction à l’économie elle-même à travers le consommateur. C’est beaucoup plus efficace que les systèmes de subsides conventionnels. En Californie par exemple, vous recevez 2 000 dollars si vous achetez une voiture hybride. Mais rien ne vous empêche d’utiliser cette somme pour acheter un billet d’avion pour Hawaï, qui réduira à néant l’effort écologique consenti lors de l’achat de votre véhicule.
Un autre projet, porté par le gouvernement de la région Flandres en Belgique, porte sur la création d’un écosystème de monnaies complémentaires. Plusieurs monnaies cohabiteront et chacune se verra affecter un rôle spécifique dont le choix est en cours. Les échanges se feront par l’intermédiaire de téléphones portables ou de cartes d’identité électroniques utilisables comme mode de paiement. Ce regroupement doit permettre d’atteindre une certaine taille critique et de mesurer l’effet de ces monnaies sur l’économie. Nous avons de bonnes raisons de croire que la dynamique sera très positive.

Un WIR Européen

La dernière initiative dont je souhaitais vous parler concerne l’internationalisation du WIR suisse. L’objectif de ce projet est de parvenir à réaliser des transactions triangulaires transfrontalières avec cette monnaie locale telle qu’elle existe aujourd’hui en Suisse. Les premières transactions pilotes sont actuellement en phase de montage. Un groupement d’achat constitué des entreprises suisses qui utilisent déjà le WIR, ainsi qu’une centrale de compensation internationale fonctionnant en coopération avec la banque WIR, devrait soutenir le réseau afin de permettre à ces entreprises d’acheter à l’étranger. Les échanges ainsi générés pourraient représenter initialement par pays participant environ 50 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. Sur le même modèle, nous réfléchissons à la création d’une monnaie interentreprises utilisable à l’intérieur de la zone Euro. Je recherche actuellement une banque capable de nous suivre dans ce projet de double monnaie. Il existe déjà des banques de ce type : au Brésil, 150 banques à double monnaie ont été lancées ces trois derniers mois afin de résoudre des problèmes sociaux. Ces banques proposent des microcrédits à la fois en monnaie nationale et en monnaie locale.
Ces systèmes parallèles peuvent nous permettre de résoudre la plupart des problèmes structurels que notre système économique et monétaire actuel ne parvient pas à traiter. Pour vous en convaincre, faites une liste des projets qui constituent de bonnes idées à vos yeux, mais qui ne se réalisent pas faute d’argent. Pourtant, les expériences dont je viens de vous parler montrent que presque n’importe quoi pourrait se substituer à cet argent qui manque. Dans cette perspective, les monnaies régionales apparaissent comme des outils de développement très efficaces, sans pour autant exclure la mondialisation : je peux accepter que cet ordinateur soit fabriqué là où il sera le moins cher à produire et qu’il soit payable en monnaie nationale, mais vouloir également que mes pommes viennent de ma région et que je puisse les acheter en monnaie régionale… Les deux systèmes peuvent tout à fait cohabiter. Tout dépendra de notre capacité à changer nos mentalités.


DÉBAT

Penser notre futur

Un intervenant : Étant moi-même à l’origine du projet français SOL, je suis évidemment convaincu de l’intérêt des monnaies complémentaires. L’une des raisons de cet intérêt réside dans le fait que les monnaies complémentaires, qui sont des monnaies affectées, possèdent un puissant effet de levier. Je m’explique : si vous injectez 100 euros pour résoudre un problème de santé, le premier bénéficiaire de cet argent pourra l’utiliser pour acheter un téléviseur coréen ou japonais. L’impact de vos 100 euros sur cette problématique de santé sera donc de 100. En revanche, si vous donnez à cette même personne une monnaie affectée à la santé, elle devra l’utiliser pour résoudre à son tour un problème de santé en rémunérant une seconde personne, puis une troisième, une quatrième et ainsi de suite. Dans ce cas, l’impact financier de 100 unités initiales sera de « n X 100 », n étant le nombre de personnes par l’intermédiaire desquels ces 100 unités vont circuler. Le fait d’avoir des monnaies affectées à une problématique spécifique accroît l’impact de votre injection de monnaie. Par ailleurs, ces monnaies affectées à une population donnée, ou à un usage donné, sont philosophiquement nécessaires au développement durable qui est une culture locale de non-expansion. Elles sont donc nécessaires pour penser notre futur.
Après ces remarques, j’aimerais savoir ce que vous imaginez comme architecture pour bâtir le système européen que vous évoquez : s’agit-il d’une internationalisation progressive du modèle suisse des WIR ou est-ce un système dans lequel cohabiteraient des monnaies bretonnes, irlandaises et basques ? Où en êtes-vous de vos réflexions ?

Bernard Lietaer : Je pense qu’il y a deux univers dans lesquels il faut être actif : le monde des affaires et de l’emploi, qui est étranglé par la raréfaction du crédit, et le monde civil, qui inclut la sphère sociale. Pour l’univers des affaires, je pense qu’il faut d’abord mettre en place un système monétaire parallèle qui puisse fonctionner à l’intérieur de la zone euro. Il faut le concevoir à l’échelle européenne à partir d’unités régionales constituées de groupes d’entreprises qui acceptent de travailler ensemble et de régler une partie de leurs échanges en monnaie complémentaire. Mon idée, c’est de travailler au niveau régional – la Bretagne par exemple – en ce qui concerne l’administration et l’organisation de ces groupements d’entreprises, mais de concevoir l’ensemble du système à l’échelon européen afin d’harmoniser l’unité monétaire de référence et de mieux gérer les problèmes de sécurité. Au niveau des monnaies civiles ou sociales, qui ont pour objectif d’induire des actions non spontanées et de les orienter dans une direction utile pour la communauté, mon idée est de travailler au niveau des villes. À Gand, la ville pilote du projet flamand, entre trois et cinq monnaies seront introduites qui utilisent le même systeme de payment, mais qui ont chacune des rôles specifiques : l’apprentissage, réduction d’émissions de carbone, encourager les jardins commestibles urbains, etc. De plus, une monnaie régionale va s’articuler autour de la culture. Un budget de 1,7 million d’euros est prévu pour être consacré à des activités culturelles. En plus des subventions classiques pour les troupes de théâtres ou des organisateurs de concerts, nous allons le distribuer directement aux utilisateurs locaux sous forme de monnaie affectée. Les habitants peuvent choisir librement à quel genre de spectacle ils veulent assister, au même titre qu’ils peuvent choisir de payer leur entrée en euros. Mais ceux qui n’ont pas les moyens peuvent décider d’aider un voisin, de donner des cours de maths, en échange de ces fameux points… Les villes sont des laboratoires parfaits pour ce genre de démarches. L’idée étant de faire coïncider les « villes à intention » – une intention culturelle dans l’exemple de Gand, mais cela peut être une intention d’apprentissage ou de développement durable – et les « économies à intention ». Les monnaies complémentaires sont là pour créer les passerelles entre les deux.

Et la solidarité nationale ?

Int. : Je perçois bien l’intérêt des monnaies locales. J’ai cependant une question concernant les monnaies complémentaires à plus grande échelle, telles que vous les présentez. Nous avons besoin aujourd’hui d’une solidarité nationale pour financer l’éducation, les retraites, le RMI, dont la population a besoin. Si nous créons des systèmes avec des monnaies parallèles, qui paie la TVA, les impôts ou les charges sociales ? En quoi cela contribue à la solidarité nationale ?

B. L. : La solidarité nationale fera de plus en plus défaut dans le cadre économique actuel. Les monnaies complémentaires peuvent justement aider les gouvernements à traiter ce problème : il suffit de définir des monnaies à vocation purement sociale, et de les détaxer. Pour la simple raison qu’elles servent à résoudre des problèmes qui, sans elles, coûteraient aux contribuables. Le Time Dollar, dont je vous ai parlé tout à l’heure, est officiellement exempt d’impôts. En revanche, tous les échanges commerciaux réalisés à l’aide de monnaies comme le WIR sont aujourd’hui taxables en monnaie nationale. Je suggère toutefois qu’une partie de ces taxes puissent être réglées dans la monnaie complémentaire que les entreprises acceptent entre elles. Cela permettrait en retour à l’État d’acquérir, avec cette monnaie auprès de la communauté d’entreprises qui l’accepte, une partie des biens ou des services dont il a besoin. Cela permettrait de créer de l’activité additionnelle tout en montrant l’exemple.

Un standard contre le troc

Int. : Je me souviens d’une séance de l’École de Paris ou l’orateur était venu nous parler des réseaux réciproques d’échanges de savoirs, dont elle est à l’origine3. Le principe en est le suivant : échange leçons de comptabilité contre leçons de piano. Cela fait résonance avec ce que vous évoquez mais il n’y a pas de monnaie. Est-ce que cela vous paraît de même nature ?

B. L. : C’est de même nature. Toutefois, comme dans tout troc, l’inconvénient du système réside dans le fait que ce type de transaction ne possède pas de standard. Le meilleur professeur de piano n’est pas forcément celui qui a besoin de mes leçons d’anglais. Dans ce cas, il n’y a pas de transaction possible. Rien ne s’oppose en revanche à ce qu’ils adoptent une unité de compte commune – l’heure, par exemple – qui permet de faciliter la transaction. Le « bon » professeur de piano est alors payé en heures et non plus en cours d’anglais. Il peut en disposer pour s’offrir le service dont il a besoin. Et je peux fournir mes cours d’anglais à une autre personne de ma communauté qui désire apprendre cette langue.

Et le risque communautariste ?

Int. : Je souhaiterais vous soumettre mes interrogations quant aux effets qu’entraînerait le développement à grande échelle de monnaies complémentaires telles que celles que vous décrivez. Je vois cinq remarques qui pourraient être formulées ainsi : la première porte sur les questions de régulation, dont l’absence est en partie à l’origine de la crise que nous connaissons. Quels seraient les systèmes de régulation si le WIR s’échangeait entre 600 millions d’Européens ? Quid ensuite des phénomènes mafieux ? Ma troisième interrogation concerne le risque communautariste. Ma quatrième remarque porte sur le risque d’enrichissement des banques grâce à leur activité de « changeur » de monnaies : devant l’accumulation d’argent dans le système, il faudra bien rééquilibrer moyennant le prélèvement d’une commission. Ma dernière remarque, enfin, concerne les emplois que l’on risque de détruire dans l’économie classique en les créant dans une économie parallèle. De fait, le temps consacré aux échanges que vous évoquez, pour gérer les problèmes de vieillissement par exemple, ne sera pas utilisé à la création « classique » de richesses, permettant le paiement de pensions aux retraités. De ce point de vue, le bouclage macroéconomique ne me parait pas garanti.

B. L. : Les deux premiers points que vous évoquez représentent des dangers potentiels réels. Mais ils peuvent être résolus de la même façon : tous les systèmes dont je vous ai parlé s’appuient sur une transparence totale vis-à-vis des utilisateurs de la monnaie. Avant que j’engage une transaction avec vous, j’ai le droit de regarder votre compte en monnaie complémentaire et vous avez le droit de regarder le mien. Cette transparence rebute en général la mafia, qui préfère les systèmes anonymes et opaques. Quant au risque d’enrichissement des banques sur l’activité de change, celui-ci n’est possible que s’il existe une convertibilité automatique. Ce n’est pas le cas pour les monnaies complémentaires : le WIR existe depuis 75 ans et n’est pas convertible en francs suisses. De la même manière, le Time dollar n’est pas convertible en dollars : l’unité reste l’heure. Les créateurs de cette monnaie présument d’ailleurs que le temps a la même valeur pour tout le monde. Du coup, aucun dentiste n’accepte de se faire payer en Time dollars. Mais si vous voulez faire fonctionner le système dans une société complexe et diversifiée, vous pouvez adapter le système et permettre qu’un dentiste ou un médecin puisse être rémunéré deux ou trois heures en Time Dollars pour 20 minutes de consultation. Si vous êtes d’accord avec cette proposition, cela peut tout à fait fonctionner.

Un emploi ou un travail ?

Votre remarque sur l’emploi soulève un problème central. J’y répondrai de façon plus radicale. Je prétends que l’idée selon laquelle il existe un emploi pour chacun est en train de disparaître avec l’ère industrielle. En revanche, je fais la distinction entre ce que les Anglais nomment un « job » – une activité ou un métier que l’on pratique pour gagner de l’argent – et ce qu’ils appellent « work » pour exprimer l’activité que l’on exerce par passion. Pour faire la distinction entre les deux, il suffit de se poser la question suivante : si j’avais suffisamment d’argent pour vivre confortablement jusqu’à la fin de mes jours, continuerais-je à exercer le métier que je fais ? Si la réponse est « oui », il s’agit d’une véritable passion. Dans le cas contraire, il s’agit seulement d’un emploi, d’un « job », comme pour l’immense majorité des gens dans le monde. Et bien je pense que le monde des « jobs » est mourant : nous n’avons plus besoin de 6 milliards d’individus pour produire les biens et les services dont nous avons besoin. L’emploi n’est pas la solution du futur. Le travail l’est. Les monnaies complémentaires permettent d’une certaine manière de rémunérer ce travail, et d’en faire une priorité. Pour répondre à votre question sur le communautarisme, j’ai besoin que vous me précisiez ce à quoi vous faites allusion.

Int. : Je voulais évoquer le risque de création de circuits d’échange fermés qu’entraîne l’utilisation de monnaies complémentaires utilisables dans une communauté restreinte.

B. L. : Je vous avoue que je ne vois pas en quoi cela pose un problème d’échanger un cours de guitare contre une leçon de plomberie. Dans l’un des scénarii développés dans mon livre, The Future of Money, j’évoque un monde dans lequel il n’y aurait plus que des monnaies complémentaires locales sans lien les unes avec les autres. Ce n’est pas de cela dont je parle. Un tel scénario signifierait une rupture complète avec l’économie conventionnelle, ce qui me semble ni désirable ni probable.

Un pont entre besoins sans réponse et ressources sous-employées

Int. : Si vous deviez convaincre les responsables politiques d’une ville d’accepter une monnaie complémentaire, quelles questions leur poseriez-vous ?

B. L. : Je leur demanderais quels sont les besoins et les objectifs qui ne sont pas remplis à l’échelle de cette ville. En d’autres termes, que leur manque-t-il ? Je leur demanderais enfin quelles sont les ressources qu’ils estiment sous-employées dans cette même ville : les gens sans travail, les espaces vides et inoccupés, la nourriture non consommée… Il y en a beaucoup plus qu’on ne le pense. La monnaie complémentaire est une manière de construire un pont entre ces besoins sans réponse et ces ressources inexploitées.

Int. : Ce que vous dites me fait penser à ce que Keynes évoquait dans son essai Perspectives économiques pour nos petits enfants publié en 1930, dans lequel il prédisait avec humour une dépression nerveuse universelle le jour où 15 heures de travail hebdomadaire suffiraient pour produire tous les biens dont nous avons besoin : il est parfois difficile de savoir s’organiser sans ce « job » qui nous fait vivre… Ma première question porte sur l’articulation entre la monnaie complémentaire et la monnaie principale. Une entreprise qui accepte le WIR peut-elle l’utiliser pour payer son personnel ? Celui-ci accepte-t-il cette forme de rémunération et peut-il, avec cette monnaie, acheter ce qu’il souhaite ? Ma seconde interrogation concerne la notion de confiance, indispensable pour qu’une monnaie puisse s’échanger. Comment s’établit-elle ? L’échelle régionale est-elle à votre avis plus propice à l’émergence d’un tel sentiment ?

B. L. : En Suisse, en dehors des entreprises industrielles, les secteurs de l’hôtellerie et de l’immobilier acceptent les paiements en WIR. Une partie du salaire peut être payée en WIR. La prime de fin d’année peut l’être, cela se fait de gré à gré. Il existe d’ailleurs un petit catalogue qui indique tous les hôtels et les restaurants qui acceptent les WIR en Suisse. Ces échanges ne représentent pas le gros des transactions en WIR, mais cela existe. En réponse à votre seconde question, je répondrais que la monnaie et la confiance sont une tautologie. On peut créer la confiance – au sein d’une communauté par exemple – et bâtir une monnaie basée sur cette confiance, ou bien créer la monnaie justement dans le but de créer de la confiance et du lien entre les gens. Dans de nombreux cas, les monnaies complémentaires sont d’abord créées pour que les habitants d’un quartier se parlent !

Le Wara, une monnaie fondante

Int. : Pourriez-vous nous parler du Wara, cette monnaie régionale qui a été créé en Autriche avant la guerre ?

B. L. : Le Wara est en réalité né en Allemagne, pour être précis elle fut mise en circulation en 1931 à Schwanenkirchen, une petite ville minière de Bavière. À l’origine, cette monnaie était basée sur un kilo de charbon. Deux mille entreprises allemande l’acceptaient entre elles, la préférant à la monnaie nationale de l’époque. Ce n’est qu’après son interdiction par le ministre allemand des Finances que les Autrichiens de la commune de Wörgl s’en sont inspirés, sous l’impulsion du maire de la ville. La monnaie de Wörgl était une monnaie fondante, qui avait une taxe de 1 % de sa valeur tous les mois afin de limiter sa thésaurisation. Le Chiemgauer allemand, dont j’ai parlé tout à l’heure, est aussi une monnaie fondante. Pour maintenir à jour la valeur de votre argent, vous devez, chaque trimestre, coller sur chaque billet un timbre représentant 2 % de sa valeur faciale. L’idée est d’éviter d’en faire un instrument d’épargne mais plutôt de favoriser sa fonction d’instrument d’échange.

Int. : Il existe aujourd’hui des moyens de paiement performants dans la sphère du commerce, comme la carte Visa, par exemple, mais comment imaginez-vous l’avenir des moyens de paiement de personne à personne ?

B. L. : Je pense que le téléphone mobile constitue le meilleur support pour les échanges de personne à personne. Les fonctions permettant l’activation d’un porte-monnaie électronique existent déjà sur la plupart des téléphones. Il suffit de les activer. La technologie est là. De façon paradoxale, les moyens de paiement les plus avancés pour les monnaies complémentaires se trouvent dans les pays en développement comme le Kenya ou le Kazakhstan. Pour la simple raison que dans ces pays-là, il n’y a pas de banque à courtcircuiter pour la mise en place du système.

Monnaie et climat ?

Int. : En quoi les monnaies complémentaires peuvent-elles résoudre les problèmes climatiques ?

B. L. : Pour tenter d’enrayer les problèmes liés au changement climatique, il faudrait que des entreprises comme Exxon Mobil mettent en place des stratégies basées non pas sur les résultats financiers du prochain trimestre, mais sur un horizon d’une centaine d’années.. Tant que leur souci sera d’optimiser les opérations du trimestre suivant, cela ne fonctionnera pas. La vision à court terme, qui est une caractéristique de notre civilisation, est programmée par notre système monétaire. Par définition, toutes les monnaies bénéficiant d’un taux d’intérêt positif escomptent le futur. Mais pour les spéculateurs et la plupart des chefs d’entreprises, ce futur n’excède pas 5 ans.
Mais cela n’a pas toujours été comme ça. Lorsqu’il fallait cent à cent cinquante ans pour bâtir une cathédrale, il se trouvait bien des communautés pour en financer la construction. Ils n’étaient pas fous, mais possédaient tout simplement un modèle monétaire différent, qui s’appuyait sur le système du “demeurage”, équivalent à un taux d’intérêt négatif . Un tel système était utilisé au Moyen-âge et encourageait des projets sur le très long terme.
Nous travaillons actuellement à l’élaboration d’une monnaie, le Terra, qui s’appuie sur ce principe. Le Terra est un reçu d’inventaire d’un panier de matières premières mondiales critiques, dont le coût du stockage est payé par le porteur de la monnaie. Son taux d’intérêt est donc négatif, comme le Wara ou le Chiemgauer, ce qui décourage de les garder trop longtemps. Dans le cas du Terra, c’est le coût de stockage des matières premières sur laquelle cette monnaie s’appuie qui représente ce taux d’intérêt négatif. C’est le même principe que le péage d’un parking : le prix de la place de parking ne dévalue pas la valeur de votre voiture, mais cela vous coûte de la laisser longtemps au même endroit. Lorsque l’on escompte une monnaie comme celle-là, le long terme devient profitable. Le Terra est une monnaie à grande échelle qui a été conçue de manière à convaincre les entreprises à penser loin devant. Elle a été imaginée comme une monnaie susceptible de se substituer aux dollars dans le cas où la monnaie américaine s’effondrerait.

Le juste prix

Int. : Je reste convaincu par le rôle social de la monnaie complémentaire tel que vous venez de l’exposer, mais j’aimerais vous poser une question en ma qualité d’entrepreneur. Contrairement à ce qui a été évoqué tout à l’heure, je ne pense pas que le problème de la confiance soit si complexe à résoudre : il l’a déjà été en partie avec des dispositifs commerciaux comme les traites, où l’on promet de payer à une certaine date. Ce qui m’ennuie davantage, c’est la question du prix : comment rattache-t-on le prix d’un bien à une valeur exprimée en monnaie complémentaire ? Je ne saurai pas, par exemple, à combien de WIR vendre un bien que je fabrique.

B. L. : Je vais vous apporter une réponse très simple. S’il est difficile de gagner des euros, il est très facile d’en dépenser. Il vous suffit d’inverser la vapeur ! Dans une monnaie complémentaire, il vous suffit de savoir à quoi vous allez l’utiliser avant de l’accepter. Si vous savez à quoi vous allez dépenser vos WIR, vous savez ce qu’ils valent. C’est tout. Ce n’est pas plus difficile que de penser en euros.

Notes:
1 http://www.ithacahours.com
2 http://fr.wikipedia.org/wiki/Chiemgauer
3 "Offre cours d’économie, demande cours de soudure" : le succès des réseaux d’échanges réciproques de savoirs Claire HÉBER-SUFFRIN, Jean-Jacques PIARD, séminaire Vies Collectives, mai 1997.

Présentation de l’orateur

……… Bernard Lietaer a été actif dans le domaine des systèmes monétaires durant 30 ans dans une inhabituelle variété de fonctions. A la Banque Nationale de Belgique, il était responsable pour la mise en oeuvre du mécanisme de convergence (ECU) vers le système européen de monnaie unique. Durant cette période, il était également président du système belge de paiement électronique. Il est l’auteur de 15 livres écrits an 5 langues, dont The Future of Money traduit en 18 langues. Son ouvrage le plus récent en Français est intitulé Monnaies Régionales : De nouvelles voies vers une prospérité durable. Plus d’informations sur l’auteur sont disponibles sur www.lietaer.com.
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L’Association des Amis de l’École de Paris du management organise des débats et en diffuse des comptes rendus ; les idées restant de la seule responsabilité de leurs auteurs. Elle peut également diffuser les commentaires que suscitent ces documents.
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Diffusion juillet 2009

Séminaire Entrepreneurs
Villes et Territoires
organisé avec le soutien de l’Institut CDC pour la
recherche, de la Caisse des dépôts et consignations et
du ministère de l’Industrie et grâce aux parrains de
l’École de Paris :
Air France
Algoé2
Alstom
ANRT
Areva2
Cabinet Regimbeau1
CEA
Chaire “management de l’innovation”
de l’École polytechnique
Chaire "management multiculturel
et performances de l’entreprise"
(Renault-X-HEC)
Chambre de Commerce
et d’Industrie de Paris
Conseil Supérieur de l’Ordre
des Experts Comptables
Danone
Deloitte
École des mines de Paris
EDF
Entreprise & Personnel
ESCP Europe
Fondation Charles Léopold Mayer
pour le Progrès de l’Homme
Fondation Crédit Coopératif
France Télécom
FVA Management
Roger Godino
Groupe ESSEC
HRA Pharma
IDRH
IdVectoR1
La Poste
Lafarge
Ministère de l’Industrie,
direction générale des Entreprises
Paris-Ile de France Capitale
Economique
PSA Peugeot Citroën
Reims Management School
Renault
Saint-Gobain
Schneider Electric Industries
SNCF1
Thales
Total
Ylios

1 pour le séminaire Ressources Technologiques et Innovation
2 pour le séminaire Vie des Affaires
(liste au 1er juillet 2009)

© École de Paris du management - 94 bd du Montparnasse - 75014 Paris
Tél : 01 42 79 40 80 - Fax : 01 43 21 56 84 - email : ecopar@paris.ensmp.fr - http://www.ecole.org

Ont participé : J.-É. Aubert, V. Bastien, P. Bernard, M. Berry (École de Paris du management), D. Bretelle-Desmazieres, J.-C. Capelli (Friendsclear), C. Ceron, F. Chery, J. Clade, J.-M. Cornu, M.-A. Cotteret, R. Coulomb, S. Couvreur, P.-X. Dalloz, C. Damiba, N. de Bremond d’Ars, N. Delcourt, R. Delorme, L. Deschamps (Prostective 2100 / CNRS), Y. Dougin, A. Dulaure, Y. Fisselier, T. Gaudin (Prospective 2100), N. Gillio, H. Gourio, M. Hellouin, H. Hollanders, W. Kalonovski, S. Latouche, J.-P. Lemaire, J.-M. Levy-Dreyfus (Gotapp Paytap), P. Lukacs, H. Maillot, B. Mialaret, N. Paquet, G. Payan, J.-F. Perard, G. Postel-Vinay (DGCIS), C. Riveline (École des mines de Paris), A. Sauvaget, M. Tirel, I. Torrelli (Renault), P. Traska, J.-F. Susbielle, A. Valabregue. F. Weill (École de Paris du management), J.-L. Winger.

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