venerdì 5 giugno 2009

La course à la redéfinition du PIB

Divergences sur une nouvelle mesure de la richesse

LE MONDE | 05.06.09 |

Premier à franchir la ligne d'arrivée provisoire dans la course à la redéfinition du PIB : le Conseil économique, social et environnemental (CESE). Le 28 mai, la "troisième assemblée" des institutions françaises , consultative, a remis à François Fillon le rapport que le premier ministre lui avait commandé, par une lettre du 20 janvier, sur "les indicateurs du développement durable et l'empreinte écologique". Cinq jours plus tard, le 2 juin, on pouvait découvrir sur le site Internet de la Commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social, créée au début de 2008 à l'initiative de Nicolas Sarkozy et présidée par l'Américain Joseph Stiglitz, Prix Nobel d'économie, un texte en anglais de 92 pages présenté comme un "résumé provisoire" des travaux de ce groupe international de trente-trois économistes.

Ces recherches, dont la crise a accéléré la mise en route, ont trois objectifs : réconcilier les Français, et, plus largement, les citoyens du monde, avec les statistiques, qui reflètent mal, selon eux, la réalité de leur vie quotidienne ; faire face à l'urgence écologique ; et donner aux hommes politiques des instruments de mesure pertinents pour agir.Une grande partie du travail est donc disponible. Mais les difficultés ne font que commencer. Le gouvernement va devoir faire deux types de choix. Entre les nouveaux indicateurs proposés par les uns et les autres : mesure des inégalités sociales, empreinte écologique, bilan carbone, etc. Il faudra aussi décider de la méthode à retenir, pour que l'ensemble de la population s'approprie ces nouveaux indicateurs. Un point fait l'unanimité : l'inadéquation du produit intérieur brut (PIB) censé définir la richesse d'un pays. Il ne mesure pas, par exemple, la qualité de vie.

Seules les activités de marché sont comptabilisées, ce qui exclut, par exemple, les loisirs et le travail domestique. Le PIB ne rend pas compte de la répartition des revenus : en privilégiant la notion de moyenne, il ne reflète pas la dispersion des inégalités. Enfin, il ne tient compte ni de l'épuisement des ressources naturelles ni de leur dégradation.

Bref, son toilettage est indispensable pour privilégier la démarche de développement durable qui vise à un équilibre harmonieux entre trois piliers : l'économique, le social et l'environnemental.

Il ne devrait donc pas y avoir de grosse bagarre entre experts sur l'idée (émise par la Commission Stiglitz) de compléter les comptes nationaux - en France et au sein de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), afin de favoriser les comparaisons internationales - avec une batterie de nouveaux indicateurs : un PIB corrigé qui tiendrait compte des inégalités ; un revenu disponible net ; le revenu médian - qui sépare la population en deux parties égales : les 50 % qui ne l'atteignent pas, les 50 % qui le dépassent - plutôt que le revenu moyen, qui peut augmenter parce que les rentrées des plus riches progressent mais pas forcément celles des plus pauvres, etc.

La piste (de la Commission Stiglitz) visant à se pencher davantage sur la qualité de vie grâce à la production régulière d'enquêtes destinées à mesurer les perceptions subjectives des populations (moments de plaisir, de peine, etc.) suscite plus d'interrogations, notamment sur la manière dont les pouvoirs publics pourraient les exploiter.

La question de la mesure du capital naturel (biodiversité, qualité de l'air, des sols, de l'eau, ressources en poissons, etc.) et de sa dégradation fait, elle, clairement débat.

Alors que la Commission Stiglitz met en avant l'empreinte écologique, le CESE l'élimine des outils à retenir : "En l'état actuel, cet indicateur est loin de prendre en compte l'ensemble des impacts environnementaux liés aux activités humaines. Exception faite des rejets de CO2, il ignore nombre de pollutions et de déchets", explique le rapporteur Philippe Le Clézio. Le CESE préfère privilégier le bilan carbone, qui mesure les émissions de CO2 générées par l'activité économique.

Réticent à la mise en place d'indicateurs agrégés, il est plutôt favorable à une logique de tableau de bord, qui comporterait une douzaine d'indicateurs (espérance de vie en bonne santé, part des énergies renouvelables dans la consommation intérieure brute d'énergie, indice d'abondance des populations d'oiseaux communs, etc.).

De son côté, la Commission Stiglitz craint qu'un nombre trop important d'indicateurs ne prête à confusion. Et réfléchit à la création de deux ou trois statistiques agrégées, dont un indicateur de "développement durable national" qui s'inspirerait de l'épargne nette ajustée (ENA) - surplus de ressources dont dispose une économie à l'issue d'un cycle de production et de consommation, une fois compensée la dépréciation du capital économique, humain et naturel -, indicateur privilégié par la Banque mondiale.

Au-delà des divergences sur les pistes à retenir, reste la question de la méthode. "L'usage politique des indicateurs nécessite qu'ils soient légitimes aux yeux des experts, mais surtout aux yeux de la population. C'est pourquoi, avant toute décision, nous proposons une consultation citoyenne", annonce M. Le Clézio, dont le projet d'avis s'est nourri de nombreuses auditions. Le rapport du CESE suggère d'organiser des conférences de consensus avec des citoyens tirés au sort, qui seraient au préalable formés par des statisticiens pour pouvoir participer activement au débat.

La Commission Stiglitz - qui n'a procédé à aucune audition - attend jusqu'au 5 juillet les remarques envoyées par courriel de ceux qui voudront réagir au résumé (en anglais) de ses travaux mis en ligne. Ses membres retiendront celles qui lui sembleront utiles, avant la remise du rapport, au plus tard fin juillet, à Nicolas Sarkozy.

"Le débat aura lieu après, explique l'économiste Jean-Paul Fitoussi, coordinateur de la Commission. Ces questions sont très techniques et il est impossible de faire intervenir le monde entier avant de finaliser le travail. Un langage commun était nécessaire, et la mesure statistique relève de l'économie."

Entre une méthode qui s'inspire de l'esprit du Grenelle de l'environnement et un débat entre experts, le gouvernement devra trancher.


Sur le Web :
- www.ces.fr ;
- www.stiglitz-sen-fitoussi.fr.

Marie-Béatrice Baudet et Laurence Caramel
Article paru dans l'édition du 06.06.09.

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